Cette synthèse de l’Ademe explique en détail la méthodologie utilisée et ses limites, puis des tableaux de résultats chiffrés par biocarburants, enfin des analyses très nuancées. Ce document invite à approfondir certaines pistes et met en garde contre des interprétations trop rapides des résultats, considérés comme très sensibles aux hypothèses conservatives utilisées.
Methodologie
En 2008, l’ADEME avait animé un travail préalable pour élaborer un Référentiel qui définissait des recommandations pour la réalisation d’Analyse de Cylce de Vie (ACV) appliquées aux biocarburants de première génération en France. Ce référentiel est téléchargeable sur cette page du site de l’ADEME. La présente étude s’est appuyée sur ces recommandations.
Elle couvre l’ensemble des biocarburants disponibles sur le marché français :
- Les filières bioéthanol : betterave, maïs, blé, canne à sucre en incorporation directe ou sous forme d’ETBE (éthyl tertio butyl ether) ;
- Les filières biodiesel : colza, tournesol, soja, palme, graisses animales et huiles alimentaires usagées ;
- la filière Huiles Végétales Pures (HVP).
Pour disposer de référence, les carburants fossiles ont également été étudiées : les filières pétrolières de production de diesel et d’essence ont été prises en compte sous deux spécifications : EURO4 et EURO5.
Enfin, cette étude a couvert deux types de carburant pour chaque biocarburant :
- un niveau d’incorporation de 10% en volume ;
- un niveau d’incorporation plus élevé.
Cinq indicateurs d’impacts environnementaux ont été analysés :
- Un indicateur de réchauffement climatiques : les émissions de Gaz à Effet de serre ;
- Un indicateur d’impact contribuant à l’épuisement des ressources non renouvelables : la consommation d’énergie non renouvelable ;
- Deux indicateurs d’impacts sur la santé humaine : l’Oxydation photochimique et la toxicité humaine ;
- L’eutrophisation : l’eutrophisation est une des étapes du processus naturel qui transforme lentement les lacs peu profonds en marais, puis en prairie et finalement en forêt.
Tous les calculs ont été faits pour une unité fonctionnelle standard : « parcourir un kilomètre ».
Les résultats
Ils ont été calculés pour chaque biocarburant, sur l’ensemble de leur cycle de vie (« du champ à la roue ») et sur les cinq indicateurs présentés ci-avant. De nombreux tableaux récapitulent ces résultats : on retiendra de l’analyse qui conclue ce rapport les points suivant :
- Consommation d’énergie non renouvelable : l’ensemble des biocarburants présente des bilans bien plus favorables que leurs homologues fossiles ;
- Emissions de gaz à effet de serre : hors prise en compte de l’impact sur le réchauffement de changements d’affectation des sols, l’ensemble des biocarburants présente des bilans moins émissifs que les carburants fossiles : entre 20 et 40 g CO2equivalent/MJ contre 96 à 100 respectivement pour le diesel et pour l’essence ; Ce résultat est très nuancé par les rédacteurs de l’étude qui indiquent que « le niveau exact de réduction est délicat à évaluer et dépend fortement du rendement agricole à l’hectare, des apports d’engrais et émissions NéO afférentes, ainsi que de l’intensité et les sources énergétiques du procédé de transformation ».
- Potentiel d’oxydation photochimique : les biodiesels français sont légèrement plus émetteurs de molécules à pouvoir photooxydant que les carburants fossiles. Les autres esters ont des niveaux inférieurs, notamment les huiles usagées et graisses animales ;
- Potentiel de toxicité humaine : pour les esters, le bilan présente des valeurs négatives sur ce potentiel de toxicité. Le potentiel de toxicité pour les éthanol et les essences est plus faibles que pour les diesels
- Potentiel d’Eutrophisation : avec des niveaux 10 fois plus élevés que les carburants fossiles, aussi bie pour les éthanols que pour les esters, les biocarburants présentent des bilans défavorables pour cet indicateur.
Limites de l’étude
- Il n’existe pas en France de valeurs de facteurs d’émission ou de modèle actualisé, validé et reconnu au niveau international. L’étude est restée proche des travaux du GIEC en retenant des valeurs située dans la fourchette haute des émissions mesurées aux champs ;
- L’étude n’a pas pris en compte les amortissements des sites industriels de production, etc.
- Surtout, cette synthèse de l’étude n’a (finalement) pas pris en compte l’impact environnementale d’un éventuel changement d’affectation des sols, qui avait été évalué dans l’étude complète. C’est le point le plus critiqué de cette synthèse par les organisations environnementales, qui affirment : « si l’on intègre l’effet du changement d’affectation des sols indirect, calculés dans le rapport complet, le bilan d’émission de gaz à effet de serre de l’huile de colza produite en France est le double de celui du diesel qu’il remplace ». La synthèse de l’Ademe publiée attire cependant l’attention sur l’impact très négatif que semblable changement pourrait avoir sur les bilans, en particulier dans le cas d’une déforestation pour produire des biocarburants : elle rapporte :
- « Les changements d’affectation des sols peuvent venir modifier grandement ces résultats, voire pourraient potentiellement les inverser » ;
- Plus loin, la synthèse parle à ce sujet de « zones d’ombre », qui devraient faire l’objet de « travaux spécifiques » ;
- Pourtant, l’étude complète, dont une partie des conclusions n’a pas été publiée, fournit des résultats accablants.
« Analyse de Cycle de Vie appliquée aux biocarburants de première génération consommés en France. Synthèse. »
Etude réalisée pour le compte de l’ADEME, du Ministère de l’Écologie, de l’Energie, du Développement Durable et de la Mer, du Ministère de l’Alimentation, de l’Agriculture et de la Pêche, et de France Agrimer par Bio Intelligence Service, Direction des Energies Renouvelables, des Réseaux et Marchés énergétiques – ADEME, Septembre 2009, 26 pages