Le marché européen du carbone où s’échangent des permis d’émission, ou « droits à polluer », dans le cadre du Protocole de Kyoto sur le climat, est plombé par les excédents de quotas de CO2 qui ont fait chuter les cours de la tonne de CO2 à des niveaux impensables il y a un an.
Dépêche AFP du 14/02/2007.
La marché européen du carbone est un mécanisme qui vise à endiguer les émissions de dioxyde de carbone, un des gaz à effet de serre responsables du réchauffement climatique, en imposant des quotas aux pollueurs tout en leur permettant d’acheter des droits d’émission à ceux qui polluent moins.
Il a été imaginé par les signataires du protocole de Kyoto qui fête le 16 février le deuxième anniversaire de son entrée en vigueur.
L’idée était d’inciter les industriels à investir dans des technologies propres et à défaut d’acheter sur le marché des droits d’émission aux entreprises les plus vertueuses.
Mais le cours de la tonne de CO2 qui était monté jusqu’à environ 30 euros début 2006 sur le marché au comptant, s’est depuis effondré à 1,3 euro, un tarif qui permet aux pollueurs d’acheter des permis à bon compte, et qui n’incite guère à investir dans des technologies propres.
« Cela reflète l’excédent de quotas par rapport aux émissions constatées », explique Jean-François Conil-Lacoste, Directeur général de Powernext qui représente 70% de l’activité des bourses européennes sur le marché spot.
Début 2006, sur un marché « encore jeune » (il a démarré en juillet 2005) « on s’attendait à une pénurie de quotas », les producteurs d’électricité étant demandeurs face à des industriels sur la réserve « qui n’ont pas voulu vendre tout de suite les quotas dont ils disposaient », explique-t-il pour justifier la flambée initiale du cours de la tonne de CO2.
Mais dès le printemps 2006, le marché du carbone a plongé quand on s’est aperçu, après vérification, que les émissions d’un certain nombre de pays en 2005 étaient nettement inférieures aux quotas plutôt généreux alloués à leurs entreprises.
Les plans nationaux d’allocations de quotas (Pnaq) courent sur la période 2005-2007.
A court terme, il n’y a « pas tellement de raisons que les choses changent », estime M. Conil-Lacoste. D’autant que la douceur de l’hiver laisse un répit aux centrales thermiques et aux émissions de CO2, fait-il remarquer.
Mais la seconde phase (2008-2012) devrait permettre de remettre les compteurs à zéro.
Sur le marché à terme (2008), la tonne de CO2 se négocie d’ailleurs autour de 14 à 15 euros, un niveau nettement plus élevé que sur le marché au comptant.
Le cours de ces certificats d’émissions varie en fonction de la météo, du prix relatif des combustibles, de la croissance économique et de la contrainte imposée par le pouvoir politique pour réduire ces émissions.
Pour la deuxième phase, l’évolution des cours sera fonction de la Commission européenne et du tour de vis qu’elle pourra ou non donner aux plans d’allocation de quotas.
« La Commission a laissé passer des plans d’allocations laxistes pour la première période », commente Morgane Créach, du Réseau action climat France (Rac). « Mais elle a décidé de ne pas jouer le même jeu pour la période 2008-2012 et d’être plus sévère avec les Etats membres », souligne-t-elle.
Bruxelles et Berlin se sont vigoureusement opposés au cours des dernières semaines sur la limite annuelle des émissions imposée à l’industrie allemande pour la période 2008 à 2012.
« Où mettre le curseur sans menacer trop la compétitivité industrielle tout en s’inscrivant dans une dynamique de réduction des émissions, ce n’est pas facile », commente M. Conil-Lacoste.
Jérome Levet