Afrique de l’Est : Des institutions financières ouvrent leurs portes à des petites entreprises du secteur énergétique

L’accès au financement reste difficile pour les petites entreprises du secteur énergétique mais une série de programmes de formation ciblés ont l’intention de changer cette situation.

Dans un pays d’environ 39 millions d’habitants, seule 14% de la population du Kenya a accès au réseau électrique. Cette statistique est même plus basse chez les pays voisins, l’Ouganda et la Tanzanie, où de nombreux foyers en Afrique de l’Est utilisent la biomasse, des piles sèches et du kérosène pour satisfaire leurs besoins énergétiques. GVEP International tente de renverser la tendance.

A travers son programme de développement des entreprises du secteur énergétique (DEEP), l’organisation vise à développer une industrie durable et étendue de micro et petites entreprises énergétiques, pour rendre plus accessibles les services d’énergie modernes aux populations des zones rurales et semi-rurales en Afrique de l’Est.

Le programme a apporté un soutien technique et entrepreneurial à plus de 500 entrepreneurs à la tête de start up et de petites et moyennes entreprises existantes (PME), mais ce qui a apporté un facteur clé à leur expansion, est l’accès à un financement approprié. GVEP International Afrique de l’Est a organisé une série de sessions de formation au Kenya, en Ouganda et en Tanzanie pour inciter les institutions financières à s’engager dans le financement du développement des entreprises du secteur énergétique.

« Les instituts financiers peuvent contribuer au développement du secteur énergétique en stimulant l’offre de crédit pour les PME rurales et périurbaines ainsi que la demande pour les produits énergétique grâce à un meilleur accès aux crédits à la consommation », explique Phyllis Kariuki de GVEP International, spécialiste des Institutions Financières.

Les ateliers qui ont formé un total de 71 cadres supérieurs, 120 cadres moyens et 144 PME, ont utilisé plusieurs méthodes de formation, y compris des séances de brainstorming, des études de cas, des présentations, et des séances d’information et de partage des connaissances.

Plusieurs vidéos produites par GVEP sur des fours améliorés, du solaire photovoltaïque, l’énergie éolienne et le biogaz et la production de briquettes, ont été présentées pour expliquer les différentes technologies énergétiques et aider les gestionnaires et entrepreneurs à apprécier les potentiel d’affaires dans ces secteurs. Les ateliers ont également exploré différentes options financières, les stratégies de marketing qui peuvent être adaptées pour les produits énergétiques et les risques liés à la gestion de portefeuilles d’énergie.

En collaboration avec les ateliers, une séance de mise en réseau a eu lieu à Luwero, Ouganda, pour réunir des entrepreneurs, des fournisseurs et des financiers du secteur énergie. L’événement, qui visait à établir des relations et utiliser les synergies au sein du secteur, a contribué à mettre en valeur les capacités des entrepreneurs et à les relier à des instituts financiers.

Des ventes et plusieurs contrats ont été réalisés à la suite de cette séance de réseautage. Ugastove Ltd, une entreprise fabriquant des fourneaux améliorés, a réalisé ce jour-là des ventes pour un montant de 800.000 UGX (env. £ 220) et a eu des contacts pour vendre leurs produits à deux sociétés participantes également de l’exposition. Des institutions financières ont aussi participé à cet événement, y compris Katikamu SACCO, qui, depuis la formation finance/ énergie a affecté 25% de leur portefeuille de prêts dans le secteur énergie et identifié plusieurs fournisseurs lors de la séance de réseautage qu’ils recommanderont à leurs clients.

Les sessions de formation ont reçu des réponses positives à la fois de la part des gestionnaires financiers et des entrepreneurs. « En tant qu’expert sur le terrain, les connaissances acquises au cours de la formation m’ont aidé à conseiller les clients sur les produits énergétiques qui s’offrent à eux », explique Kevin Ian, un représentant des ventes de Faulu Advisory Services situé à Eldoret, au Kenya.

Pendant la formation, les institutions financières ont noté que l’énergie était un des portefeuille de prêts qui pouvait non seulement aider à améliorer leurs offres de prêt, mais également soutenir le développement communautaire dans les domaines qu’ils exploitent.

Plusieurs membres de Big Fish Brands, un distributeur de lampes LED basé à Nairobi, ont assisté à la formation des PME. David Mugah, le Directeur des Opérations de Big Fish Brands explique ce que l’entreprise espère changer à la suite de la formation : « Nous voulons réduire au minimum les crédit à court terme car ils peuvent être très coûteux. Durant la formation, nous avons parlé du concept de planification des activités et de l’importance de planifier nos activités, au sein de notre grande équipe, nous voulons mettre en place un plan de travail et le présenter à une institution pour nous offrir plus de soutien « .

Nombreux étaient de l’avis que les vidéos de formation réalisées par GVEP ont contribué à mettre en évidence les lacunes financières qui peuvent être comblées dans le marché énergétique. Les participants ont demandé à ce que plus de séances de réseautage soient organisées dans le futur ainsi que des formations financières pour les mentors qui appuient le programme.

Laure Ego, GVEP

L’électricité au coeur des défis Africains – les messages clés

« L’électricité au cœur des défis africains », ouvrage écrit par Mme Christine Heuraux, Directrice du Pôle Accès à l’énergie à EDF, et paru aux éditions Karthala, a fait l’objet d’une conférence/ débat le 19 octobre dernier au siège de l’Agence Française de Développement à Paris.

De nombreux participants (ONG, Consultants, secteur privé) sont venus écouter les différents intervenants présents (Christine Heuraux, Directrice du Pôle Accès à l’énergie ; Michel Hamelin, Direction Action Internationale ADEME, Marc Raffinot, économiste et maître de conférence à Paris Dauphine et Christian de Gromard – Spécialiste Energie – AFD) et ont activement participé au débat que suscite l’électrification – tout particulièrement rurale- en Afrique.

En Afrique, l’accès à l’électricité est un problème majeur qui freine considérablement son développement. Elle est le continent le moins électrifié du monde : l’Afrique représente 15% de la population mondiale, pour seulement 3% de la consommation électrique. Un chiffre très frappant, mais à nuancer selon les régions : l’Afrique du Nord est électrifiée à plus de 90%, et l’Afrique du Sud, à elle seule, représente près de la moitié de l’électricité produite sur le continent. C’est bien sûr l’Afrique subsaharienne, hors Afrique du Sud, qui est la plus en retard : 48 pays, 10% de la population mondiale, et des installations électriques équivalentes à celle de la Pologne. Plus inquiétant, en 2030 la moitié de la population mondiale sans électricité vivra en Afrique subsaharienne.

Partant de ces constats sans appel, l’ouvrage « L’électricité au cœur des défis Africains » écrit par Christine Heuraux, qui se veut à la fois concret et pratique, se propose de synthétiser les informations essentielles relatives au secteur de l’électricité en Afrique, en se concentrant sur l’Afrique subsaharienne, l’électricité et l’électrification des milieux ruraux.

Christine Heuraux, lors de son intervention durant la conférence, a mis en évidence un certain nombre de messages clés que l’ouvrage veut faire passer pour que l’Afrique relève avec succès le défi de son électrification, notamment en milieu rural où vivent 500 millions de personnes encore dépourvues d’accès à toute forme moderne d’énergie.

Tout d’abord l’importance de la gouvernance, c’est-à-dire la volonté politique des Etats sans lequel aucun progrès durable ni significatif n’est envisageable – cette volonté doit se traduire par des planifications énergétiques et électriques de long terme, mais aussi par la mise en place de cadres institutionnels, réglementaires, et par des règles de gouvernance susceptibles de rassurer les investisseurs.

Puis l’importance des échelles régionales pour optimiser les ressources (énergétiques, environnementales, humaines, capitalistiques) et favoriser une meilleure adéquation entre les ressources et la taille des marchés, souvent trop petits à l’échelle nationale pour attirer les investisseurs. On estime à 2 milliards de $ par an le gain qui émanerait pour le secteur électrique d’une coordination à l’échelle régionale.

Ensuite, il serait illusoire de ne vouloir régler le retard de l’électrification que sous l’angle technique et financier : la formation professionnelle sera une composante majeure dans la réussite de tous les efforts d’électrification, tous secteurs confondus, car elle seule est à même de pérenniser les efforts entrepris.

Enfin, les choix technologiques qui seront déterminants, et c’est précisément la raison pour laquelle il faut éviter de les aborder avec dogmatisme ; mieux vaut les traiter avec pragmatisme et réalisme, en tenant compte des réalités de terrain, des ressources locales mais aussi de l’usage auquel on les destine. A rappeler que l’Afrique bénéficie de richesse extraordinaire en ressources les plus variées : 10% des réserves mondiales hydrauliques économiquement exploitables ; 9% des réserves de pétrole ; 8% de celles de gaz et 6% de celles de charbon ; sans compter les potentiels éoliens et en biomasse. Il ne faut également pas oublier de réhabiliter l’existant et de favoriser les programmes d’efficacité énergétique.

Christine Heuraux souligne que même si le manque de financement est souvent mis en avant comme principale raison de la carence en d’électrification en Afrique – 40 milliards de $ par an seraient nécessaires jusqu’en 2020 là où aujourd’hui les investissements ne sont que de 11 milliards – sans une prise en compte des points mentionnés ci-dessus les projets ne pourront pas être mis en place ni optimisés.

Cependant un autre défi reste sans doute le plus préoccupant : celui du temps. Il y a urgence à ce que tous les acteurs se mobilisent, – politiques, financiers, industriels, ONG, etc. – chacun selon son rôle et ses compétences, mais aussi en prenant soin de se coordonner.

« Alors que le continent africain connaît une croissance moyenne de 5% par an depuis le début des années 2000, soit deux fois plus que l’Europe, cette croissance reste insuffisante pour atteindre les Objectifs du Millénaire. Elle devrait en effet être de 7 à 8%, un chiffre qui serait atteint en remédiant aux déficits du secteur électrique qui font perdre chaque année 1,5 points de croissance. On comprend bien tout l’intérêt de se mobiliser pour coordonner les efforts en vue de son développement rapide. », précise Christine Heuraux.

C’est bien en ce sens qu’agit GVEP International, qui, à la demande de la Banque Mondiale, conduit actuellement une consultation sur un programme pour soutenir le secteur de l’électrification rurale au Mali et au Sénégal. Le programme sera mis en œuvre par les agences gouvernementales du pays avec l’assistance de GVEP International. Ce programme est financé par le gouvernement russe. Au Mali le principal objectif est de soutenir les opérateurs en mobilisant et renforçant le secteur financier, au Sénégal, c’est la productivité de la consommation énergétique qui est recherchée.

En complément – Lire l’article sur RFI suite à la conférence : L’Afrique sous équipée en électricité, par David Baché, RFI –

Laure Ego, GVEP

Pérou : Combinaison de plusieurs technologies

Des foyers dans des régions reculées du Pérou ont été approvisionnés en eau et en électricité grâce à des roues hydrauliques équipées d’aimants permanents.

« Nous savons tous que les roues sont anciennes » commence par dire Miguel Hadzich, coordinateur du Centre d’Aide Rurale de l’Université Pontificale Catholique du Pérou. « Ce que nous essayons de faire est de combiner une technologie ancienne avec une moderne afin de produire de l’électricité. »

Hadzich est le chef de projet d’une initiative visant à développer des roues hydrauliques à écoulement libre, qui peuvent à la fois pomper de l’eau et produire de l’énergie. Le projet est une des 26 propositions lauréates du Concours d’Innovation Energétique IDEAS 2009, une compétition organisée et sponsorisée par GVEP International, la banque Inter-américaine de Développement (IDB), la Coopération allemande GTZ, et le gouvernement sud-coréen.

La roue peut avoir été inventée bien avant le Christ, mais maintenant l’équipe à l’Université Catholique de Lima utilise une technologie moderne pour en faire un générateur à aimant permanent. « Il est composé de deux plaques magnétiques, dont l’une à l’extérieur tourne mais pas l’autre située à l’intérieur. Ce mouvement génère de l’électricité et les aimants empêchent tout frottement, il n’y a donc pas d’usure », explique Hadzich.

En outre, des courroies, poulies et des chaînes ont été utilisées pour améliorer le système de transmission hydraulique des roues à eau. Cela contribue à augmenter la vitesse des roues, qui sont généralement installées dans les rivières et les canaux avec un débit d’eau lent.

Le système de transmission est le même que celui utilisé par des milliers de motos-taxis dans le pays. Il est facile et peu coûteux à réparer. « Ce ne doit pas être une machine sophistiquée parce que les personnes que nous formons dans chaque collectivité doivent être en mesure de la fabriquer, la vendre et la réparer si quelque chose casse », dit Hadzich.

Dix mois après le début du projet, quatre des huit roues prévues ont été installées. Trois opèrent dans les villes de Cachimayo, Huiro et Langui dans la région de Cusco, et la quatrième se trouve à Jaen, à Cajamarca.

Les quatre roues produisent déjà de l’électricité, entrainant une série de changements positifs dans la vie des familles locales. Non seulement ils ont maintenant la lumière, mais « ils peuvent également regarder la télévision et charger les téléphones mobiles, ce qui leur permet de rester en contact avec de la famille vivant très loin dans d’autres parties du pays », dit Hadzich.

Le projet, comme les autres propositions gagnantes du concours IDEAS, vise à favoriser les petites entreprises. « L’idée est la suivante : dans chaque endroit où nous installons une roue il y a une personne qui a été formée pour reproduire la machine et la vendre dans toute la région. »

Un de ces micro-entrepreneurs est Christopher Valdez, un « agriculteur novateur » qui a participé à une formation Yayachiqs (un programme qui permet aux hommes des Andes à apprendre par l’expérience) il y a quelques années. Il a ajouté un piston à la roue hydraulique produisant de l’énergie, permettant à cette même machine maintenant de pomper de l’eau à domicile à une certaine altitude.

Aux yeux de Hadzich, Cristóbal est un « entrepreneur de terrain », une personne qui a à peine fréquenté l’école et qui ne peut pas effectuer des calculs mathématiques compliqués, mais qui peut néanmoins construire une roue hydraulique pour un client sans aucune difficulté.

Les types de roue développés par le projet pour les zones côtières et montagneuses sont maintenant testés sur le terrain. Au cours des derniers mois, Hadzich et son équipe ont été contraints de résoudre des problèmes qu’ils n’avaient pas rencontrés dans le laboratoire ou prévus dans leurs calculs. Les conditions en laboratoire sont optimales, avec un débit d’eau constant et une eau propre, mais « quand vous allez sur le terrain, c’est l’inverse qui se passe », explique Hadzich avec un sourire. « Le flux d’eau arrive avec des branches, le ciel est nuageux et un imprévu se produit. » Travailler sur le terrain est une situation où vous apprenez en permanence.

Le prochain défi, laissé en dernier car « un peu plus difficile », sont les roues à installer dans la jungle, où les conditions sont totalement différentes, présentant à la fois des avantages et des inconvénients. Le débit de la rivière dans la jungle est constant, ce qui est un avantage, mais en retour il est lent. Pour produire de l’électricité dans cet environnement, des roues plus grandes devront être installées sur des radeaux flottants.

« Peu importe les conditions, et malgré tous les problèmes qui surgissent en chemin », affirme Hadzich, « l’idée est que cette roue, comme celles créées au cours des derniers milliers d’années, va durer. La technologie que nous avons maintenant devrait fonctionner sans problème. »

Regardez la vidéo avec l’interview de Miguel Hadizch – Avec l’aimable autorisation du Global Post sur lesite de GVEP International

Laure Ego, GVEP