Afrique de l’Est : comment capturer le vent

L’histoire d’un entrepreneur- inventeur au Kenya qui ressemble beaucoup à celle du héros du livre « le jeune homme qui a apprivoisé le vent », best-seller international.

Au cours d’un voyage en Afrique de l’Est en février, je lisais l’histoire d’un jeune Malawien qui a fabriqué un moulin à vent de toutes pièces pour produire de l’électricité.

Il a approvisionné sa famille en éclairage, et a alimenté une pompe qui a permis d’irriguer les terres. C’est une incroyable histoire d’ingéniosité et de détermination. Le héros de cette histoire, William KamKwamba, est en train de connaître une renommée internationale. Le livre « Le jeune homme qui a apprivoisé le vent » a été préfacé par Al Gore.

Vers la fin de mon voyage, j’ai rencontré Peter Muiruri, qui a également fabriqué un moulin à vent à partir de pièces détachées de matériaux de récupération. Peter vit en milieu rural au Kenya, pas loin de Nakuru dans le Rift Valley. Tout comme KamKwamba, son moulin à vent est composée d’une roue de vélo suspendue au dessus d’une mince tour en bois. Il utilise la turbine pour éclairer sa maison, pour recharger des batteries ainsi que des téléphones à peu de frais. Il a également fabriqué plusieurs machines qu’il fait fonctionner avec l’électricité produite par l’éolienne.

L’une des machines de Muiruri peut tisser de la laine. Il fabrique des fils qu’il teint et vend aux femmes qui en font de petits tapis. Parmi ses inventions il y a également un petit moulin en métal.

Mais le plus original de ses produits est un gadget qui permet d’enfumer les taupes : il est composé d’un moteur récupéré sur une radiocassette, alimenté par deux vielles batteries de téléphone portable, et qui fait tourner un petit ventilateur. Ce ventilateur est lié par un petit tube à une cannette contenant du papier en braise. De l’autre côté de la cannette il y a un petit tube qui propulse la fumée du papier en braise à l’intérieur des tunnels pour faire sortir les taupes.

Muiruri est un autodidacte complet. Il n’a reçu aucune formation en électricité ni en fabrication d’éolienne. Actuellement, la quantité d’énergie que peut produire son éolienne est assez faible parce qu’il manque de fonds pour améliorer sa vitesse et pour agrandir l’alternateur. Il a également besoin d’une tour plus solide pour soutenir les pales des éoliennes, davantage de ficelles, et d’autres pièces. La facture pourrait revenir à 1000 dollars US. Avec davantage de courant, il peut recharger beaucoup plus de batteries et de téléphones ; des services qui sont de plus en plus demandés par la clientèle.

GVEP-International travaille avec Muiruri à travers le programme de Développement de Petites Entreprises. A l’exemple d’autres entrepreneurs de la Région de Nakura, nous l’aidons à accéder à un emprunt afin qu’il puisse faire changer d’échelle à son activité. Muiruri a déjà commencé à tenir les comptes de ses revenus. Il n’avait jamais fait d’emprunt auprès d’une banque, ni auprès d’un fournisseur de crédit, et il est très angoissé à l’idée de s’engager dans cette responsabilité.

L’équipe de GVEP-I travaille avec lui pour renforcer ses activités actuelles, y compris l’acquisition de conseils auprès d’un fabricant de turbines de petites éoliennes. Avant de négocier un prêt pour Muiruri, GVEP-I va s’assurer qu’il a les compétences nécessaires pour gérer sa dette et que son business plan est économiquement viable.

En regroupant des entrepreneurs qui ont besoin de crédit pour poursuivre leurs activités, et en circonscrivant les risques liés à ces emprunts, GVEP-I sera en mesure de négocier le financement adéquat pour ces micro entreprises, dont la plupart se seraient battues vainement pour accéder à un financement sécurisé.

J’ai montré à Muiruri un exemplaire du livre « Le jeune homme qui a apprivoisé le vent ». Il m’a demandé où il pouvait l’acheter. Je lui ai offert le mien.

Par Simon Collings, Directeur des Opérations GVEP International

« Le jeune homme qui a apprivoisé le vent » de William KamKwamba est publié chez HarperCollins.

Laure Ego, GVEP

Microfinance et énergie solaire

Les crédits de micro finance destinés aux produits solaires peuvent faire augmenter les ventes et permettre aux entreprises solaires d’atteindre des clients qui ont des revenus faibles ou irréguliers.

Arc Finance, une organisation à but non lucratif, intervient dans la recherche de solutions pour faire augmenter les crédits énergétiques.

Environ 1,6 milliards de personnes n’ont toujours pas accès à l’électricité et plus de 2,5 milliards de personnes n’ont pas accès aux équipements de cuisson propres. La plupart des personnes sans accès à l’énergie n’ont pas les moyens financiers qui leur permettraient d’accéder aux services énergétiques propres. Plus particulièrement les populations à faibles revenus des pays en développement dépensent beaucoup d’argent dans la consommation de l’énergie. Pour beaucoup de ces consommateurs vivant en milieu rural, l’achat, puis l’installation d’un système solaire domestique standard reviennent en moyenne à 250 dollars US (selon la taille et le lieu d’installation à travers le monde).

Mais cette installation peut fournir de la lumière et de l’énergie pendant plusieurs années avec un minimum de frais de maintenance et de remplacement des batteries. Toutefois, l’expérience a montré que la plupart des consommateurs sans accès à l’électricité ont des difficultés à réunir l’argent nécessaire pour payer comptant les équipements solaires. Les entreprises solaires préfèrent ainsi servir les personnes à hauts revenus qui peuvent payer comptant leurs produits plutôt que d’imaginer des conditions spéciales à l’intention des personnes à plus faibles revenus.

Un sous emploi du potentiel du crédit énergétique

Le manque de crédits abordables et appropriés ainsi que d’autres schémas financiers, représentent des barrières principales qui restreignent un plus grand accès aux services et produits énergétiques propres. Aussi, par manque de schémas financiers à l’intention de l’utilisateur final, il sera difficile à la plupart des entreprises énergétiques de changer d’échelle significative. Les institutions de micro finance ont fait la démonstration de l’efficacité d’accorder des crédits aux micros entrepreneurs et aux foyers, et cela reste favorable aussi bien à l’emprunteur qu’au prêteur.

Si les prêts des institutions de micro finance sont bien conçus, ils peuvent permettre aux clients d’accéder aux services modernes d’énergies de haute qualité en adaptant les remboursements des prêts aux flux existants des dépenses et des revenus. De tels emprunts peuvent permettre de faire face aux coûts initiaux associés aux technologies énergétiques plus propres et plus efficaces, y compris le solaire.

Bien qu’il représente la plus grande part de dépenses dans plusieurs foyers, le potentiel crédit énergétique est sous-utilisé à cause du manque de connaissances et d’échanges d’informations entre les consommateurs, les institutions de micro finance et les fournisseurs d’énergie. Cependant il est évident que le niveau de l’accès à l’énergie moderne peut être plus élevé à travers l’accès à des emprunts innovants et à des schémas adaptés de micro finance, et cela peut favoriser une nouvelle ligne de produit avantageux aussi bien aux institutions de micro finance qu’à une bonne partie de la communauté financière.

Pour la plupart des entreprises d’énergie durable, le marché est limité aux consommateurs qui peuvent payer comptant leurs services et produits énergétiques. Le marché potentiel du secteur solaire peut être transposé sur les consommateurs existants si les utilisateurs finaux peuvent avoir accès aux produits et services énergétiques à partir des emprunts fournis par des institutions de micro finance. L’établissement de liens forts entre les institutions de micro finance et les entreprises énergétiques, peut être productif pour plusieurs actionnaires.

Les foyers et les petites entreprises sont capables de se procurer des produits et services énergétiques qui peuvent apporter des plus-valus économiques et alimentaires, mais cela reste hors de leur portée s’ils sont emmenés à payer comptant. Dans ce contexte, les prêts accordés par les organismes de micro finance peuvent faire augmenter les ventes et permettre aux entreprises solaires d’atteindre les clients à revenus faibles ou irréguliers. Pour les institutions de micro finance, la mise en place de prêts spéciaux leur permet de fidéliser davantage leur clientèle, de diversifier leurs produits, d’augmenter la compétitivité et, d’une manière générale de renforcer leur clientèle de base tout en observant des impacts positifs sociaux et environnementaux.

Micro finance et partenariat

L’expérience a montré que le lien entre micro finance et énergie peut être salutaire, mais cela demande beaucoup d’engagement entre les institutions de micro finance et les entreprises énergétiques. Le partenariat avec une institution de micro finance peut exiger de la part d’une entreprise énergétique d’investir davantage au-delà de ses opérations traditionnelles (augmentation du budget et du personnel), par exemple, la création d’un nouveau poste de chargé de clientèle et de prêt. Dans la mesure où plusieurs institutions de micro finance peuvent avoir une portée nationale, les entreprises solaires peuvent également se rendre compte qu’un nouveau partenariat en micro finance exige une expansion rapide de leurs activités d’installation et de l’élargissement des services après vente dans les zones géographiques régulièrement mal desservies.

Du côté des institutions de micro finance, les prêts énergétiques ont besoin d’un schéma bien élaboré et cela peut exiger des formations techniques destinées aux chargés de prêts, modifiant les modes opératoires habituels, introduisant des modes de suivi et d’évaluation spécialisés en énergie, et demandant des fonds dédiés pour créer des portefeuilles énergétiques. Enfin, la construction d’un accord de partenariat entre les entreprises énergétiques et les institutions de micro finance doit clairement définir les rôles de chaque partie prenante, les moyens de communication et de coordination ainsi que les garanties de stocks pour les services après vente et pour les nécessités de formation.

Plusieurs entreprises énergétiques reconnaissent l’importance de l’assistance technique selon l’un ou l’autre des schémas décrits ci-dessus. Arc Finance est une organisation à but non lucratif qui intervient dans la recherche de solutions pour faire augmenter les crédits énergétiques. Créé en 2008, Arc Finance conduit aujourd’hui des activités dans sept pays en Afrique, en Asie et en Amérique Latine, en développant et en optimisant des portefeuilles de prêts énergétiques, en collaboration avec les institutions de micro finance et les entreprises énergétiques.

Arc Finance présente un ensemble de propositions de services, en conseils et en expertises techniques, à des organisations financières, particulièrement aux institutions de micro finance, ainsi qu’aux entreprises énergétiques intéressées par l’introduction de programmes d’emprunts énergétiques dans leurs activités. Ces services incluent les recherches de marchés, les définitions des besoins énergétiques, l’assistance technique pour la mise en place de modèles économiques et des produits d’emprunts énergétiques, l’appui au partenariat ainsi que la définition et l’évaluation de programmes pilote.

Arc Finance soutien également les institutions financières dans le renforcement des capacités du personnel, la gestion, la formation de la clientèle et la sensibilisation du public, ainsi que dans la mise en place de systèmes de suivi et d’évaluation. En ce qui concerne les institutions qui disposent déjà d’une certaine expérience dans le prêt aux services énergétiques, Arc Finance présente un ensemble de propositions complètes de mise en échelle, destinées à l’identification d’obstacles, l’amélioration des savoir faire, la diversification de l’offre des produits et l’atteinte des objectifs.

Cet article a été publié pour la première fois dans “Partnership for Clean Indoor Air bulletin“, n° 22 janvier 2010.

Pour plus d’information sur Arc Finance, visitez leur site (anglais). Contact : Jacob Winiecki.

Laure Ego, GVEP